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De l’embrasse protectrice de Netanyahou à son étau létal : les guerres de Sweida

Hadi Abd Alhay by Hadi Abd Alhay
8 août 2025
in Analyses
Reading Time: 16 mins read

Par Hadi Abd Alhay, masterant en science politique à l’Université de Lille.

Entre son exploitation politique par le gouvernement israélien et le cadre extrémiste takfiri du nouveau gouvernement syrien, la minorité druze de Sweida reste la grande perdante des changements politiques actuels en Syrie.

"Sweida ne sera pas votre poignard empoisonné dans le dos de la Syrie". Une manifestation sur la place Al-Karamah de Sweida le 27 février 2025, rejetant les projets séparatistes et l'ingérence israélienne. Crédits : Lava Ahmad.

Le dimanche 13 juillet 2025 sur la route Damas-Sweida, un groupe de Bédouins de la campagne de Sweida a kidnappé un chauffeur conduisant un camion chargé de légumes, l’a agressé et volé sa cargaison. Un groupe armé druze de Sweida a riposté, ce qui a déclenché un conflit armé entre les deux camps. Les tribus bédouines ont alors mobilisé des groupes islamistes extrémistes, tenant un discours takfiri à l’encontre des Druzes, les accusant d’être des apostats de l’Islam. C’est ainsi que cette escarmouche a été médiatisée : Druzes contre Bédouins. Un conflit communautaire. Druzes contre sunnites. Un conflit religieux. Les Druzes sont accusés par des groupes islamistes extrémistes d’être des mécréants (kuffār), les excluant du consensus religieux et les stigmatisant, jusqu’à justifier les violences envers eux. Des enlèvements ont eu lieu des deux côtés et de violents affrontements ont fait de nombreux morts. Selon le Réseau syrien pour les droits de l’homme, au moins 558 Syriens ont été tués et plus de 783 autres blessés depuis le début des combats dans la province de Sweida au sud du pays, où vit la majorité des Druzes de Syrie.

Ce conflit diffère des précédents, car le gouvernement intérimaire de Damas a choisi d’intervenir militairement. Selon le ministère syrien de la Défense, des chars et des convois des forces de sécurité sont arrivés à Sweida pour mettre fin aux affrontements entre les tribus bédouines sunnites et les factions armées druzes. L’armée et la police militaire ont déclaré qu’elles riposteraient à toute personne qui leur tirerait dessus. En pratique, cette intervention revient à prendre parti pour les tribus sunnites. En effet, la ville de Sweida est majoritairement druze, tandis que ses environs sont habités par des tribus sunnites : quelle que soit la route empruntée, les convois militaires traversent des zones sunnites pour atteindre le centre-ville. Lors de son arrivée, l’armée n’a pas demandé aux milices sunnites de se retirer, mais au contraire de rester en position. Ainsi, l’armée s’est de facto retrouvée aux côtés des factions sunnites : la riposte sans sommation, présentée comme adressée aux deux camps, visait en réalité les factions druzes. Cette collusion est renforcée par les liens entre les deux contingents : depuis la chute du régime d’Assad, le service militaire se fait majoritairement au volontariat. Des hommes des tribus sunnites de toute la Syrie ont depuis rejoint l’armée syrienne. Nombre d’entre eux viennent des tribus de la province de Sweida : lorsque l’armée arrive sur place, des membres de la même tribu se font face, frères, cousins, oncles. Ainsi, loin de mener une opération punitive ou de pacification, l’armée syrienne s’est coordonnée avec les factions sunnites, donnant à ce conflit des allures de guerre civile.

Deux jours plus tard, le mardi 15 juillet 2025, le ministère syrien de la Défense a annoncé un cessez-le-feu et son entrée dans la ville de Sweida le jour même. Ahmed al-Dalati, le chef de la sécurité intérieure à Sweida, est apparu aux côtés de notables et de dirigeants provinciaux, y compris les cheikh druzes Hamoud al-Hanawi et Hussein Jarbou, second du cheikh Al-Hajri, pour annoncer un accord entre la province de Sweida et le gouvernement de Damas. Mais quelques heures plus tard, le cheikh Al-Hajri a publié une déclaration affirmant que la déclaration de bienvenue à l’entrée de l’armée leur avait été imposée par Damas et sous la pression de pays étrangers. Il a également demandé une intervention extérieure et l’arrêt des bombardements incessants et injustifiés contre les habitants de Sweida. Cette démonstration de force a lieu dans un contexte politique défavorable à la minorité druze. Damas s’appuie sur une base populaire à Sweida représentée par les Bédouins de la ville et quelques intellectuels qui soutiennent le gouvernement intérimaire. Ce soutien est numériquement très modeste, mais renforcé par le sentiment anti-Al-Hajri qui a grandi ces dernières semaines. Le cheikh druze Al-Hajri est plus haute autorité religieuse à Sweida, et en l’absence de représentation politique propre à la minorité druze, il a un rôle politique de premier plan.

Ces affrontements opposent des factions locales, mais également différentes aspirations pour un nouvel État syrien. Ces factions se battent pour l’avenir de la Syrie, entre un État incluant toutes les minorités qui composent le peuple syrien, et un État provisoire déjà acté, et de plus en plus extrémiste. Deux hommes forts incarnent cette opposition, le cheikh druze Al-Hajri, cheikh de la mouvance druze historiquement la plus représentée dans la province de Sweida, faisant office de président spirituel des Druzes de Syrie, et Ahmed al-Charaa, président provisoire du nouveau régime syrien. Ils défendent des visions opposées d’un futur Etat syrien, mais chacun au prix d’une compromission avec l’État israélien. Bordant la province de Damas au sud, l’importance politique de Sweida est double, en raison de son rôle à l’échelle nationale en 2023 et en raison du rôle stratégique ambivalent du peuple druze sur la scène régionale.

Sweida a en effet joué un rôle clé sur la scène nationale syrienne lorsque ses habitants ont organisé des manifestations pacifiques quotidiennes pour réclamer la chute du régime d’Assad. Ces manifestations se sont poursuivies pendant plus d’un an et ont porté leurs fruits avec la chute du régime le 8 décembre 2024. Ce ne sont pas seulement des mots qui ont renversé le régime d’Assad, car les factions armées de Sweida se sont mobilisés pour libérer l’ensemble de leur province. Elles sont allées jusqu’à la ville de Jaramana, dans la banlieue de Damas, pour soutenir l’opération du 27 novembre 2024 « Dissuader l’agression » menée par Hay’at Tahrir al-Sham (HTS) dans le but d’étendre leurs zones de contrôle, conduisant finalement au renversement du régime d’Assad. À l’époque, la minorité druze a alors affirmé son soutien au projet de construction d’un État syrien pour tous les Syriens.

Comment passer d’une libération collective à « Celui qui libère gouverne »

Dès la chute du régime Assad, la réponse des nouveaux dirigeants de Damas, représenté par Ahmed al-Charaa qui dirige l’HTS, a pris la forme d’une série de mesures et de décisions qui ont porté un premier coup au rêve démocratique syrien, pour lequel les Druzes de Sweida s’étaient battus. Cette domination politique et militaire a commencé par l’annonce de la formation d’un « gouvernement de transition » et la nomination de Mohammed al-Bashir au poste de Premier ministre le 9 décembre 2024, sans aucun dialogue avec les forces locales, incarnant ainsi son nouveau slogan « Celui qui libère décide ».  Puis, le 29 décembre a été actée  la décision n° 8 annonçant l’intégration des factions armées dans la nouvelle armée nationale. Cette décision donne des postes de commandement dans la nouvelle armée à un certain nombre de chefs de factions djihadistes salafistes, de nationalité non syrienne, ayant participé à l’opération « Dissuader l’agression ». L’armée syrienne a ainsi pris un virage religieux djihadiste, tandis que les minorités syriennes en ont été écartées. Aucun officier issu de ces minorités n’a été nommé au sein de la nouvelle armée. En janvier 2025, Ahmed al-Charaa, ancien commandant de la faction djihadiste Hayat Tahrir al-Sham (HTS), a été nommé président transitoire lors du « Congrès de la victoire de la révolution syrienne » qui s’est tenu à Damas. Le slogan « Celui qui libère décide » est ainsi devenu « Celui qui libère gouverne », confirmant une domination sunnite sur la Syrie.

Ce changement a entraîné une multiplication des courants et opinions politiques à Sweida, divisant la ville entre ceux qui soutiennent le maintien de l’État actuel, offrant une chance au gouvernement de transition, et ceux qui s’y opposent, dénonçant son caractère discriminatoire et le manque de représentation des minorités syriennes. Cette période a été marquée par de nombreuses négociations et déclarations, parmi lesquelles se distingue le courant d’Al-Hajri, qui appelle à une intervention étrangère et à une protection internationale, reflétant ainsi son manque de confiance dans le gouvernement de transition de Damas. Le fossé s’est donc creusé entre les Druzes de Sweida et le gouvernement provisoire de Damas. La majorité des groupes armés de Sweida a refusé de rendre les armes et de rejoindre le ministère de la Défense, tant qu’une constitution garantissant les droits des minorités n’était pas mise en place au sein du nouvel État.

Le 13 mars 2025, le président provisoire a signé une déclaration constitutionnelle provisoire, qui lui confère des pouvoirs étendus, dépassant ceux de l’exécutif. Cette concentration excessive du pouvoir entre les mains du président a suscité de vives critiques à Sweida, où elle a été considérée comme dépassant les pouvoirs dont jouissait auparavant le président déchu Bachar al-Assad. Moins d’un mois après cette annonce, le premier affrontement militaire a éclaté entre les forces du gouvernement provisoire de Damas et les factions druzes dans les villes à majorité druze de Sahnaya et Jaramana. Avec l’aggravation de la crise et des affrontements d’une part, et l’escalade des menaces ainsi que des discours de haine contre les Druzes d’autre part, le discours anti-gouvernement provisoire de Damas s’était intensifié à Sweida. Le cheikh Al-Hajri a continué d’appeler une intervention étrangère de ses voeux, offrant à Israël l’occasion tant attendue d’intervenir militairement, sous le prétexte de protéger les Druzes. Israël a alors lancé des frappes aériennes et pénétré dans le sud de la Syrie. Le cheikh Al-Hajri n’a pas rejeté ouvertement l’intervention israélienne, mais s’est contenté d’affirmer la syrianité de Sweida et de nier les accusations de séparatisme portées contre son mouvement. La popularité de son mouvement n’a cessé de décliner, comme celle du Conseil militaire qui le soutient toujours. Fondé le 24 février 2025, le Conseil militaire est un groupe de militaires dissidents du régime syrien et d’officiers à la retraite, rejoint par des combattants locaux, de la province de Sweida. Les combats ont pris fin avec la signature d’un accord prévoyant la mise en place des services et institutions de l’État syrien provisoire à Sweida, avec une police judiciaire composée de ressortissants de la province, tandis que l’État assume la responsabilité du maintien de la sécurité sur la route Damas-Sweida.

Al-Hajri contre Al-Charaa, la mascarade des pro-Israéliens contre les anti-Israéliens, au profit de Netanyahou

L’accord établi entre les représentants du gouvernorat de Sweida et le gouvernement intérimaire central n’a pas permis de rétablir une relation de confiance entre les Druzes et leur dirigeants à Damas. Face à l’augmentation des accusations de séparatisme portées contre Al-Hajri, d’autres voix, considérées comme plus patriotiques, se sont élevées, représentées par les cheikhs Hammoud al-Hannawi et Hussein Jarbou, partisans du nouveau régime provisoire. Malgré la forte présence de ces deux cheikhs au sein de la communauté druze de Sweida, le nombre et l’impact de ceux qui les ont suivis dans l’idée de rapprochement avec l’État provisoire n’ont pas été suffisants pour remettre en cause l’hégémonie d’Al-Hajri. Ce dernier est resté sur sa position et a insisté pour ne pas faire confiance au gouvernement provisoire de Damas. Il s’est encore rapproché d’Israël à la suite de sa déclaration et de l’annonce de son intervention militairement. Lors du premier affrontement entre les factions druzes et les factions islamistes alliées au gouvernement syrien, la radio de l’armée israélienne a déclaré dans un communiqué : « Israël réaffirme son engagement profond à protéger les Druzes en Syrie ». Elle a également transmis qu’« Israël avait adressé un avertissement sévère au régime syrien et lui avait demandé de mettre fin aux attaques contre les Druzes ». Les critiques de plus en plus vives à l’encontre Al-Hajri ont été accompagnées par la rumeur selon laquelle, il serait en contact direct avec Israël par l’intermédiaire la délégation religieuse de Sweida qui a effectué un pèlerinage très controversé en mars 2025, au mausolée du prophète Shu’ayb, en Israël, sur les terres occupées de la Palestine de 1948.


Dans le même temps, le gouvernement de Damas n’est pas resté les bras croisés, mais a ouvert des voies diplomatiques avec Tel-Aviv sous forme de négociations directes et indirectes. Israël a envahi le sud de la Syrie dès la chute du régime d’Assad et pris le contrôle de vastes zones, dont la plus importante et la plus symbolique est le sommet du Mont Hermon, Jabal al-Cheikh. Le contenu des déclarations israéliennes concernant l’entrée de l’armée israélienne dans le sud de la Syrie a changé : l’objectif est devenu de sécuriser les frontières de l’État d’Israël et dans le but de créer une zone tampon dans le sud de la Syrie, selon des sources militaires de l’armée de défense israélienne IDF. Le ministre israélien de la Défense, Yisrael Katz, a déclaré le 28 janvier 2025, lors de sa visite au sommet du Mont al-Cheikh que les forces israéliennes resteraient en Syrie pour une durée indéterminée.

En revanche, le gouvernement de Damas a fait preuve d’un grand pragmatisme et d’une volonté implicite de normalisation avec Tel-Aviv, encouragé par le rapprochement syro-américain et le soutien manifesté par l’administration Trump à Al-Charaa après leur rencontre en Arabie saoudite. À l’initiative des États-Unis, des discussions ont été engagées sur l’adhésion de Damas aux accords d’Abraham. Un portrait photographique d’Al-Charaa a été ajouté à un panneau publicitaire à Tel-Aviv [en bas à gauche], présenté par la « Coalition pour la sécurité régionale » avec un slogan en hébreu appelant à une nouvelle « ère abrahamique ». Indépendamment des complexités du processus de négociation, le ministre des Affaires étrangères Gideon Sa’ar a déclaré que dans tout accord de paix éventuel avec la Syrie « le plateau du Golan resterait partie intégrante de l’État d’Israël ». Malgré l’insistance d’Israël pour obtenir la reconnaissance par la Syrie du droit d’Israël sur le Golan, ce qui est inacceptable pour le jeune gouvernement intérimaire, Al-Charaa espère un changement de position israélien sur le soutien aux Druzes de Sweida. Il a donc rapidement renoncé à son coup de force militaire, au profit des négociations.

Le double-jeu de Netanyahou

L’État israélien se place comme « intervenant extérieur » d’un conflit national. Cette position lui permet de prétendre à une certaine neutralité, alors que Netanyahu est un acteur au même titre qu’Al-Charaa et Al-Hajri, défendant ses propres intérêts sur le territoire syrien, dont une partie est déjà occupée depuis 1967. Les bombardements israéliens n’ont eu lieu qu’une fois que les forces gouvernementales syriennes et les tribus qui les soutenaient, avaient atteint le cœur de la ville de Sweida. Tel-Aviv a attendu qu’Al-Hajri et ses partisans soient isolés et en position de faiblesse pour acter leur soutien et ainsi renforcer son impopularité et in fine son isolement politique en Syrie. Pour la première fois, Al-Hajri a été contraint de déclarer publiquement qu’il demandait la protection extérieure de Trump et de Netanyahu, franchissant ainsi le point de non-retour et donnant l’État israélien le prétexte qu’il l’a toujours voulu pour intervenir en Syrie. Jouant sur son alliance avec le peuple druze, Israël a ainsi pu intervenir en Syrie tout en renforçant le ralliement de la communauté druze israélienne autour d’elle, alors que la guerre d’extermination à Gaza avait créé quelques fractures dans leur allégeance à l’Etat et à l’armée.

En parallèle, malgré ses frappes sporadiques contre les forces gouvernementales syriennes et les factions armées tribales, Israël a continué d’envoyer des messages rassurants à Damas. Netanyahou a mené un double-jeu, bombardant l’armée syrienne, et multipliant ses messages de soutien aux Druzes, tout en assurant Washington que ces attaques cesseraient le soir-même, selon la chaîne israélienne Channel 12. Face aux attaques israéliennes, le gouvernement de Damas a envoyé des renforts et des convois militaires à Sweida, cherchant à s’imposer par la force et à mettre fin à la présence du Conseil militaire, faction armée affilié à Al-Hajri. Mais il est également tombé dans le piège israélien et s’est retrouvé dans une impasse. L’envoi de renforts militaires aux factions non-druzes par Damas était basé sur les promesses d’Israël de mettre fin aux frappes et sur la confiance du gouvernement en sa capacité à remporter une victoire militaire rapide à Sweida.

Au contraire, la réponse militaire locale de l’armée syrienne a fourni à Tel-Aviv le prétexte idéal pour réagir et monter le curseur de la violence : lorsqu’une vidéo montrant un massacre perpétré par les forces de Damas contre neuf civils de la famille Al-Radwan dans leur propre maison a été diffusée, cela a fait exploser la situation dans le Golan occupé et a donné à Israël une base populaire interne pour faire escalader le conflit. Israël a donc lancé des frappes sur plus d’une centaine de sites militaires dans le sud de la Syrie et dans les environs de Sweida, et a couronné ses attaques en visant la ministère de la Défense au cœur de la capitale Damas, ainsi que le palais présidentiel, le « palais du Peuple », une menace directe contre le pouvoir légitime. Ces frappes n’ont pas seulement pour but de briser l’autorité du gouvernement de Damas et de le contraindre à faire des concessions à la table des négociations, mais également d’augmenter le niveau des exigences d’Israël. En effet, après avoir évoqué le retour à l’accord de désengagement signé en 1974 entre la Syrie et Israël, Israël annonce désormais son intention de créer une « zone démilitarisée » s’étendant du Golan occupé jusqu’à Sweida, sous prétexte de protéger sa sécurité nationale.

Une « guerre civile » qui profite à Israël

À la suite des frappes israéliennes, les forces de l’armée syrienne et de la sécurité militaire se sont retirées de Sweida dans la nuit du 16 juillet. Le lendemain, à 4 heures du matin, le président Al-Charaa a fait une déclaration soigneusement préparée pour justifier le retrait et éviter à son armée et à son gouvernement d’être entraînés dans une guerre perdue d’avance. Le retrait n’a pas mis fin au conflit, mais a plutôt servi de leçon au gouvernement de Damas, qui a modifié sa stratégie. Le gouvernement a mobilisé les tribus bédouines sunnites, ainsi que toutes les factions djihadistes islamiques non affiliées officiellement aux forces gouvernementales, et a facilité l’arrivée de leurs combattants dans la campagne à l’ouest de Sweida. Cette nouvelle armée a été secrètement renforcée avec des éléments des forces syriennes officielles afin de poursuivre la guerre contre Sweida depuis Damas.

Le samedi 19 juillet 2025, quelques heures après l’annonce par l’émissaire étasunien Tom Breck d’un accord entre la Syrie et Israël, la présidence syrienne a annoncé un cessez-le-feu immédiat et total à Sweida, ainsi que le déploiement des forces de sécurité dans toute la province. Damas est donc revenu à la table des négociations avec Israël. Le 24 juillet 2025, une délégation gouvernementale syrienne et une délégation israélienne se sont rencontrées à Paris, en présence du ministre syrien des Affaires étrangères, Asaad al-Shaybani, et du ministre israélien des Affaires stratégiques, Ron Dermer. Une source diplomatique a également révélé à l’AFP l’intention d’organiser une autre réunion ministérielle syro-israélienne à Bakou, en Azerbaïdjan le 31 juillet 2025. Tandis qu’Al-Charaa entre dans son « ère abrahamique », Al-Hajri, mis de côté en raison de son alliance avec Israël, se retrouve loin des sommets diplomatiques, abandonné par son « protecteur », dans une ville sinistrée et plongée dans une tragédie humanitaire.

En observant les choix diplomatiques et militaires de l’État sioniste, ainsi que leur chronologie, on peut lire une stratégie implacable de « diviser pour mieux régner », jouant sur des tensions politiques poussées à leur paroxysme, afin de réaffirmer ses alliances ou plutôt sa domination sur les deux adversaires. La guerre entre une mouvance druze menée par un chef religieux et un jeune gouvernement milicien a surtout profité à l’État israélien qui les empêche l’un comme l’autre de construire librement un nouvel État syrien. Entre les déplacements forcés, les bombardements, les destructions et les violences, le peuple syrien reste le plus grand perdant des guerres sur son territoire.

L’auteur tient à préciser que pour analyser la médiatisation de ce conflit et aider à la compréhension des tensions, l’article décrit des affrontements entre les Druzes et des tribus bédouines sunnites. Son objectif n’est cependant pas de verser dans le sectarisme, qui fait le jeu de l’Etat israélien et des mouvances takfiri.

Auteur/autrice

  • Hadi Abd Alhay
    Hadi Abd Alhay

    Hadi Abd Alhay est Masterant en science politique à l'Université de Lille.

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